Ma passion pour la création avec le cuir remonte à mon enfance. Il en est de même pour le bois, le métal et les objets traditionnels. Peut-être par nostalgie pour les choses bien faites, peut-être par reconnaissance pour le savoir-faire et la joie transmise de génération en génération par les artisans avec générosité et audace. Je suis né dans une famille dont la transmission de l’artisanat remonte à six générations. Mon père, mon grand-père, mes ancêtres ont créé de leurs mains de belles choses qui ont traversé le temps.

J’ai bien connu mon grand-père. Le bois était son univers. Il connaissait le nom de chaque outil en roumain, en allemand. C’était ainsi en son temps. Il connaissait la place de chacun de ses outils parfaitement ,à tel point que si je me glissaisen cachette dans son atelier pour utiliser une scie, il pouvait dire, juste en regardant l’usure de la lame, dans quel bois, avec quel angle et sur quelle surface je l’avais utilisé. Il pouvait savoir, juste en regardant les traces de poussière de bois, si je l’avais nettoyée, remise à sa place, si j’avais fait attention… Sinon, il me taquinait en me salissant les mains ou le bout du nez avec la colle d’os puante. Il était ainsi. Il sifflait tout le temps, et parfois il me racontait des histoires vécuesau front durant la guerre.Alors, avec tristesse,il s’arrêtait en me disant qu’on ne peut pas bien travailler avec le cœur en peine… Toutes ces petites choses, j’en ai hérité sans m’en rendre compte.

Papa. Mon père, mon héros. Professeur, modéliste, il pouvait tout faire à partir de n’importe quel truc. Il était tellement passionné qu’il en oubliait les repas, parfois sa maison et sa vie personnelle. Perfectionniste, toujours partant et surtout modeste, il a été un des meilleurs de sa génération. J’ai tout appris de lui: les outils, leur entretien, les moteurs thermiques, électriques, les moteurs de roquette à combustible solide, les engrenages, les servomécanismes, les peintures, la radio-émission, etc. Papa m’a transmis le virus de la compétition doublé de fairplay et m’a appris qu’il y a toujours une place pour mieux faire.

C’est lui également qui m’a transmis l’amour de l’aventure, de la nature sauvage, l’envie d’explorer. C’est avec lui que j’ai vu le premier piolet, la première corde d’alpinisme, les premiers crampons, le premier radeau, la première embarcation, la première hache, le premier couteau. C’est avec lui que j’ai appris la cueillette des plantes médicinales et aromatiques et celle des champignons. C’est lui qui m’a donné le premier appareil photo Smena, les premières jumelles. C’est lui qui a mis entre mes mains les livres avec des inventeurs, des explorateurs, des navigateurs, des alpinistes, des héros classiques et modernes, lui, mon premier héros.

C’est ainsi, avec timidité et émerveillement que je suis entré dans cet univers de la nature et de la création, dans lequel les gens autour de moi concevaient des objets qu’ils utilisaient dans leurs vies personnelles, professionnelles et dans leurs aventures. J’ai commencé à explorer, à créer, et il est probable que je ne n’arrête jamais. 

En 2018, encouragé par des amies, j’ai commencé à explorer le monde du cuir au niveau pro. Avec la même timidité, mais avec un infini amour. Et ce monde m’a accepté. Et la joie de cette rencontre se tourne vers vous, à travers mes créations. 

A tous ceux qui y sont ou qui ont été, merci!